Gianrico Gualtieri est né à Naples le 10 février 1962. Après une maturité artistique (1979), il fréquente la faculté d'Architecture et l'Académie des Beaux-Arts. Dès les années '80 il commence une recherche artistique sur les techniques de la peinture ancienne, en se formant d'abord à l'école du XVIIème siècle italien, et par la suite aux écoles flamande et hollandaise. Il exécute de nombreuses copies et des travaux personnels, avec une prédilection pour les genres de la nature morte et du paysage. Ses travaux personnels développent une mise en abîme de la technique même dans le chemin qui conduit du dessin à la peinture.
L'intérêt pour les techniques anciennes le porte à fréquenter des ateliers de restauration et à apprendre et pratiquer le rentoilage, le nettoyage et la retouche. Il restaure aussi des décorations murales et exécute des travaux de décoration avec des effets de trompe-l'oeil, de faux bois et faux marbre.
Il intervient comme consultant pour la décoration et pour le conseil en matière artistique, en étant très motivé par des projets de réalisations artistiques.
Dans le tableau terminé, le caractère diaphane des pétales et le jeu d'ombres et lumières sont mis en valeur par l'utilisation de la transparence, y compris dans le fond. Même si très sombre, ce dernier ne doit jamais être réalisé avec une couche épaisse de peinture, mais toujours en glacis.
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Technique
La première phase du travail d'un tableau de fleurs : sur le blanc du fond on trace un dessin qui fixe l'emplacement et les contours du sujet, ce dessin est ensuite recouvert par un vernis brun-doré qui atténue la luminosité du fond tout en la préservant. Ce vernis, une fois sec, sert de base à l'application des couches suivantes. Cette technique suit de près celle mise au point, au tout début de la peinture à l'huile, en Flandre et en Italie.
Pivoines blanches, huile sur bois, cm. 16x22
Dans le tableau terminé, le caractère diaphane des pétales et le jeu d'ombres et lumières sont mis en valeur par l'utilisation de la transparence, y compris dans le fond. Même si très sombre, ce dernier ne doit jamais être réalisé avec une couche épaisse de peinture, mais toujours en glacis.
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Les techniques anciennes de la peinture à l'huile se basent sur l’utilisation des glacis : des couches transparentes qui confèrent à la peinture sa profondeur et sa luminosité. Il ne s’agit pas seulement de savoir dessiner et mélanger les couleurs, mais de savoir calculer le résultat à l’avance, en disposant opportunément des bases qui, une fois sèches, seront recouvertes par le travail lent et patient des glacis. La science de ces deux aspects, le sens plastique de la matière et le travail des glacis, confère à la peinture ses qualités. Ces techniques sont peu connues et pratiquées et ne peuvent être imitées d’une façon impromptue, mais nécessitent d’un long apprentissage pour être apprivoisées et, par la suite, maîtrisées. Une déclinaison particulière de la technique est celle qui fait usage du bitume : un voile subtil de bitume est disposé sur un fond sombre, on travaille ensuite avec des tons de plus en plus clairs jusqu’aux lumières finales. Le bitume confère à l’image ses tons chauds et dorés et donne de la profondeur aux mélanges de couleurs.
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La destinée de l'image
Copie par Rubens (1603) de l'oeuvre perdue "La bataille d'Anghiari" de Léonard de Vinci.
C'est le seul document dont nous disposons aujourd'hui de ce chef-d'oeuvre perdu.
C'est le seul document dont nous disposons aujourd'hui de ce chef-d'oeuvre perdu.
La passion pour la peinture ancienne me frappa comme un virus au cours des premières années de mes études d'Architecture, jamais achevées. Certainement une prédisposition génétique devait déjà être présente dans les dessins de l'enfance et, par la suite, dans l'instruction artistique traditionnelle (à l'époque encore assez valable) reçue au Lycée artistique. Mais cette recherche - qui est par la suite devenue ma vie - s'annonçait déjà à ses débuts comme difficile. Il m'apparaissait clairement que quelque chose avait été négligé (je ne comprenais pas encore si cela résultait d'une sorte d'oubli ou d'une volonté consciente) et ce quelque chose était la technique dans son sens étymologique qui est à la racine de l'art : capacité, aptitude, savoir-faire. Cette idée centrale et ses nombreux corollaires : virtuosité, excellence, goût, différences naturelles et hiérarchie existantes dans la nature et parmi les hommes etc., avaient été laissées complètement de côté dans la formation de la soi-disant "culture contemporaine". Comme l'a noté un historien, le processus de formation de la culture moderne et contemporaine coïncide avec celui de l'individualisme. L'absence de principes supérieurs et la dilution de l'autorité dans la multiplicité des individus débouchent dans le relativisme. La seule véritable autorité reconnue est alors celle qui s'impose dans les faits, dans les mécanismes économiques et culturels des différents "marchés".
L'art n'échappe pas à cet état de choses, c'est même - peut-être - le domaine où il est plus évident, en particulier dans les différents phénomènes classables dans le genre de la "copie". Un brouillard épais d'ambiguïté et de confusion terminologique entoure le statut et la valeur de l'entité "œuvre d'art" : on parle de "copies", de "faux d'auteur" avec une foule de références aux "grands maîtres" et en vantant les mérites artistiques et techniques des "copies-faux". Il s'agit, en réalité, de vulgaires imitations dépourvues de goût, et dans la grande majorité des cas, de la moindre valeur technique. Ces "copies" ne naissent pas de la passion et de l'étude mais d'une volonté d'exploitation, comme tout ce qui est moderne. Exploitation de mythes relatifs à l'art, ancienne ou plus récente, que l'on ne sait plus regarder pour ce qu'elle est ; exploitation de "main d'œuvre" de l'art embauchée pour deux sous (encore mieux si en Chine ou en Hongrie) pour enrichir des gens sans scrupules. Dans le principe des choses est leur vie et leur valeur : ces objets, qui n'atteignent jamais le rang de l'œuvre, vivent leur vie de marchandise éphémère, ce sont des signes et des marques de la réduction de l'image à sa surface et à la superficialité. Superficialité doublée par l'intérêt économique et l'indulgence obtuse à de telles opérations pseudo-culturelles.
Le fait est que la destinée de l'image c'est la destinée de la technique, et la substance de l’art n’est aujourd'hui - et depuis longtemps - pas comprise. Dans la vision des anciens, la réalisation technique de l'œuvre était tout aussi importante que sa conception. Sur la base d'interprétations furvoyantes du platonisme, déjà évidentes dans les fresques de Raphaël au Vatican, à l'aube de la modernité nous avons séparé les deux moments et nié toute valeur à la technique, qui devient un simple moyen : tandis qu'elle possède une valeur en elle-même, non seulement parce qu'elle constitue l'œuvre, mais encore parce qu'elle renferme des significations symboliques, désormais oubliées.
Copie : en latin, cela veut dire abondance. La "copie" de l'œuvre d'un "maître" dans son essence c'est l'expression de la surabondance de sa valeur : valeur de la conception, valeur de la maîtrise technique, valeur de la composition, du signe et de la couleur. Valeur des significations symboliques dont la compréhension transparaît, vient à la surface, se fixe dans la nouvelle image. Une authentique copie c'est le résultat de la passion, de l'amour, de l'admiration, de l'étude technique et artistique et surtout d'une pratique incessante visant à se perfectionner pour être à la hauteur des "modèles". Celui qui copie est caractérisé par une attitude d'humilité et ne pense pas pouvoir résumer et reproduire avec facilité ce qui s'apprête à copier. Au même temps, celui qui copie a réussi à produire une certaine abondance en lui : la copie est le résultat d'un dialogue entre la surabondance de l'œuvre et celle du copiste.
La destinée de l'image est liée à la capacité que l'on saura démontrer de savoir comprendre, récupérer et mettre en œuvre (œuvres) la substance des œuvres d'art, dont la nature ultime est l'unité dialectique de naturalisme et symbolisme. Unité inséparable, même si par moments l'un ou l'autre des aspects est prépondérant. Le chemin qui conduit à cette récupération passe par l'étude, la méditation, et il passe par la copie, non pas entendue comme un exercice stérile, mais comme un moment d'approfondissement de la surabondance de l'œuvre.